Pourquoi les dreadlocks de Justin Bieber posent problème ? Pourquoi les dreadlocks de Justin Bieber posent problème ?

Pourquoi les dreadlocks de Justin Bieber posent problème ?

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Texte Clément Laré

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En choisissant une nouvelle fois de se faire des dreadlocks, Justin Bieber déclenche une polémique et se fait accuser d’appropriation culturelle. Et voici pourquoi.

Il réitère. Le 25 avril dernier, le chanteur canadien partageait sur Instagram les clichés de ses vacances ensoleillées en compagnie de son épouse, Hailey Bieber. L’occasion de dévoiler à ses quelques 176 millions d’abonnés sa nouvelle coiffure : des dreadlocks. Immédiatement, au milieu des commentaires de ses fans, sont apparues de nombreuses critiques à cet égard. Ce n’est pas la première fois qu’il opte pour cette coupe. En 2016 déjà, le chanteur s’essayait aux dreadlocks blondes. S’il avait évité tout commentaire sur le sujet, il avait été surpris par les caméras dans les coulisses des iHeart Radio Music Awards, en train d’expliquer au rappeur Big Sean : “(les gens me disent) tu veux être noir (...) et je suis juste là “c’est simplement mes cheveux””. Si les dreadlocks de Justin Bieber posent problème, c’est qu’ils sont loin d’être une simple affaire de style.

Les dreadlocks, une coiffure chargée d’histoire

L’histoire des dreadlocks remontent à l’Antiquité, puisque des traces en ont été trouvées en Egypte antique. Elles ont été portées au fil des siècles par les peuples africains ancestraux, les Celtes, les Vikings. En Inde, elles sont associées au Sadhus, celles et ceux qui renoncent à la société pour se consacrer à la religion. Au XXème siècle, la dreadlock devient indissociable du rastafarisme, né dans les années 30 en Jamaïque, et chez qui cette coiffure est un symbole de spiritualité. Par la popularité de Bob Marley dans les années 1970, les dreadlocks se répandent dans un contexte de mouvement de lutte des Noir·e·s. Aujourd’hui, ils sont “une coiffure qui représente la remise en valeur d’une identité noire, écrit la professeure et autrice américaine Syreeta McFadden pour le Guardian. C’est une coiffure de protestation et de beauté, de restauration de justice et de rejet des standards de beauté d’Europe de l’Ouest (comprenez blancs)”.

Justin Bieber accusé d’appropriation culturelle

Dans ce contexte, les dreadlocks sont alors bien plus qu’une question de cheveux et la manière dont Justin Bieber les arbore, taxée d’appropriation culturelle. D’après le Cambridge Dictionary, l’appropriation culturelle est “l’acte de prendre ou d’utiliser des choses des cultures qui ne sont pas la tienne, particulièrement en ne montrant pas que tu comprends ou respectes cette culture”. On lui oppose souvent l’idée d’appréciation culturelle. “L'appréciation finit et l'appropriation commence quand le pouvoir entre en jeu, explique à i-D Gabrielle Richardson, fondatrice de Art Hoe Collective, plateforme créative mettant en avant des artistes racisés. L'appréciation sous-entend “qu'il y a un échange égalitaire de pouvoir et de culture qui est reconnu par les deux parties et fait dans le respect.” Compte tenu des propos confiés à son ami Big Sean, Justin Bieber n’a pas l’air de comprendre d’où vient le problème. Quant aux réactions suscitées, elles semblent bien illustrer un traitement inégalitaire. Pendant que le chanteur se retrouve acclamé pour ce qui est considéré comme “un parti pris stylistique”, les personnes noires ayant choisi les dreadlocks comme manière de coiffer leurs cheveux naturels, font toujours face à la discrimination et aux préjugés. Sales, synonymes de consommation de drogue, incompatibles avec une vie professionnelle… les clichés autour des dreadlocks sont toujours nombreux et participent à discriminer ceux qui les portent pour des raisons culturelles. Aux Etats-Unis, certains Etats ont acté par la loi l’interdiction d’une “discrimination capillaire” à l’école et au travail pour que locks, tresses et afros cessent d’être prohibés.

Un traitement à deux vitesses

La différence de traitement s’illustre aussi au sein du star system. Beaucoup n’ont pas manqué de rappeler que pendant que Bieber exhibait fièrement ses locks, Zendaya ou Jay-Z n’avaient, eux, pas échappé aux stéréotypes en en faisant de même. La première avait vu sa coupe commentée par Giuliana Rancic, célèbre présentatrice américaine, qui pensait que la jeune actrice devait “sentir le patchouli… ou la weed” lors de l’émission Fashion Police. Le deuxième s’était vu attaqué sur Twitter après une avant-première où il était apparu avec ses dreadlocks, certains internautes qualifiant sa coiffure de “négligée”. “C’est aussi une partie de l’appropriation culturelle : s’approprier un objet qui n’est pas de ta culture et dont tu n’as pas eu à payer le coût social ou historique”, explique Anne-Sarah N'kuna, youtubeuse, dans l’émission IZY News dédiée à la question. En déclarant que ses dreadlocks ne sont “que des cheveux”, Justin Bieber n’omet pas seulement tout ce que symbolise cette coupe pour de nombreuses cultures, il oublie aussi de prendre conscience de ses privilèges.