Le saviez-vous ? La moustache et la barbe ne servent à rien biologiquement
Photos D.R.
Texte Anthony Vincent
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Sourcils et cils ont encore une fonction évidente de protection. La chair de poule nous rappelle l’utilité historique des poils du reste du corps, par exemple. Qu’en est-il de la moustache et de la barbe, d’un point de vue de l’évolution humaine ?
Le commun des mortels commence à bien comprendre que les poils sous les aisselles ou au niveau du pubis servent de protection naturelle développée par le corps à l’échelle de l’évolution humaine. Ça n’empêche pas beaucoup de personnes de vouloir s’en débarrasser pour des raisons esthétiques, au risque d’être plus facilement irritées ou de moins bien réguler la sueur et les bactéries. Même chose pour les cheveux, qui poussent de façon (plus ou moins) abondante pour protéger la tête du froid. Ou les sourcils et les cils qui protègent les yeux ! Même s’ils ont considérablement raccourci au fil de l’histoire, les poils sur l’ensemble du corps servent par exemple à la thermorégulation. D’où le mécanisme naturel de chair de poule quand on a froid qui dresse alors ce qui nous servait autrefois de moumoute intégrée.
Barbe et moustache n’ont pas d’utilité directe pour la survie de l’espèce humaine
Qu’en est-il de la barbe et de la moustache ? Eh bien, le mystère persiste aux yeux des scientifiques ! En fait, l’état actuel des connaissances amène à penser que les poils du visage serviraient surtout à… la déco. Ils n’ont pas de fonction directe, utilitaire, comme la plupart des caractéristiques du corps humain, mais peut-être bien plutôt ornementale. Qui est une fonction quand même utile, ne serait-ce que pour trouver une partenaire pour la reproduction et donc la sauvegarde de l’espèce. C’est d’ailleurs l’absence de poils abondants sur le visage de l’écrasante majorité des femmes qui a permis aux scientifiques de se rendre compte de cette fonction plus ornementale que fonctionnelle. Si barbe et moustache servaient vraiment à garder la chaleur au niveau de la tête, ou à prévenir les risques de maladie de ce qu’on va ingérer par la bouche… les femmes en auraient aussi ! Ce qui amène donc à penser que les poils faciaux ne servent pas directement à la survie de l’espèce.
Moustache et barbe servent à séduire des partenaires et se distinguer des rivaux
Les deux principales explications de la pilosité faciale masculine sont l'attirance intersexuelle (attirer les femmes) et la compétition intrasexuelle (intimider les hommes rivaux)”, d’après le professeur Geoffrey Miller, évolutionniste à l'université de New Mexico, interrogé à ce sujet par le média Wired. En plus d’indiquer qu’on est pubère, et donc prêt pour la procréation, ces poils peuvent également permettre de se distinguer, en tant qu’individu, mais aussi membre d’un clan. D’où le fait qu’on peut avoir une pilosité semblable entre hommes d’une même famille, mais aussi les variations de pilosité entre les populations à travers le monde par exemple. Cela peut également expliquer comment au fil même de l’histoire, une population a pu vouloir se distinguer de ses ennemis en arborant ou non une barbe par opposition. Comme par exemple, durant l’Antiquité, les Romains se rasaient de près pour se distinguer des Grecs. C’est donc plus compliqué qu’une simple question de “plus la barbe est grosse et dense, plus un homme est attractif universellement”. Au fil de l’histoire et des contextes sociaux, le poil au menton a tantôt été valorisé, tantôt décrié. Quand les hommes d’une société se mettent massivement à porter la barbe parce qu’elle devient à la mode, le meilleur moyen de se distinguer devient alors d'être rasé de près, jusqu’à ce que la tendance s’inverse à nouveau, etc.
L’homme du futur sera-t-il imberbe ?
Après des années de mode de la barbe, sera-t-elle bientôt sur le déclin en Occident ? C’est fort probable… D’autant que la pandémie a généralisé le port du masque, particulièrement inconfortable pour les barbus, puisque par effet sauna, les poils ont vite fait de donner encore plus chaud, de retenir la sueur et les odeurs, et donc de cocoter. Beaucoup d’hommes se sont donc (re)convertis au rasage de près, option moustache. Reste à voir s’ils retrouveront leurs habitudes pré-pandémie une fois que le port du masque redevenu facultatif, ou non ! Pour Christian Bromberger, professeur d'ethnologie et auteur du livre Trichologiques : une anthropologie des cheveux et du poil (Éditions Bayard), “il est plus probable que nous nous dirigions vers une société hygiéniste, aseptisée, où le poil n'aura pas sa place. Dans les bandes dessinées ou les films de science-fiction, on représente d'ailleurs souvent l'homme du futur glabre des pieds à la tête.”