Dans la routine de Luca Pronzato Dans la routine de Luca Pronzato

Dans la routine de Luca Pronzato

Entretiens

Photos Sébastien Filosa

Texte Matthieu Morge-Zucconi

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Le fondateur de ONA parle dentifrice, uniforme noir et Lisbonne.

Difficile à attraper, Luca Pronzato ? Oui, car l’homme voyage beaucoup. Sommelier de formation devenu entrepreneur, le créateur d’ONA a pris du temps à Paris pour nous parler vin, vie au Portugal et dentifrice. Avant d’aller attraper un avion pour le Mexique.

Est-ce que tu peux te présenter brièvement ?

Je m’appelle Luca Pronzato, j’ai 27 ans, j’ai créé ONA, ma première boîte spécialisée dans la nourriture, il y a maintenant 9 mois. Avant ça, j’ai travaillé au Noma, à Copenhague, pendant 3 ans, en salle. J’ai aussi pas mal travaillé dans le vin, dans des bistrots à Paris et ailleurs. Je ne sais pas vraiment où je vis car je voyage énormément, mais la boîte est installée à Lisbonne.

C’était quoi, l’idée derrière ONA ?

J’ai décidé de créer ONA car, dans les gros restaurants, tu as beaucoup de créativité en jeu, mais contrôlée par seulement quelques personnes. Autour de ça, pourtant, tu as plein de chefs assez incroyables qui sont vachement inspirés par ces chefs-là mais n’ont pas le temps de eux créer. Ils rentrent un peu dans un système, celui du restaurant, où la seule solution qu’ils ont est d’ouvrir leur restaurant après et de recréer ce système autour d’eux. On a voulu proposer une notion de partage, et on a fait plein de pop-ups, plus ouverts que tous ceux qui existaient jusque là et étaient plutôt réservés aux gens du milieu. On a eu l’idée de reprendre des lieux en recherche d’eux-mêmes : des restaurants qui ont du potentiel mais ne marchent pas, ou des lieux qui ont un potentiel fou. On redesigne tout, on met des jeunes chefs dedans, et ils créent ça pour une durée qui peut aller d’une semaine à 6 mois. On a fait le Portugal pendant 6 mois, puis Bâle, puis Paris. On va en ouvrir 4 : un à Lisbonne, à Manchester, et deux en Suisse : à Zermatt et à Zurich.

Comment fonctionnent ces pop-ups pour les chefs ?

On leur propose une structure, un style qu’on apprécie, mais autrement, c’est une plateforme sur laquelle ils peuvent faire exactement ce qu’ils veulent. C’est très libre. Ils peuvent s’amuser. On a une grosse communauté : l’idée c’est que chaque membre de ONA puisse apporter des chefs, faire la sélection… C’est un peu un système de poupées russes. L’idée, c’est de laisser s’exprimer ces jeunes chefs. Souvent, les pop-ups sont fait un peu à la va-vite. On veut aller à l’encontre de ça, être dans un très haut niveau de détail, et montrer qu’on peut monter des pop-ups très rapidement, et très bien. L’important, c’est un haut niveau de cuisine, et un gros respect pour les producteurs.

Comment es-tu venu à ce métier ?

Mes parents ont une épicerie fine italienne à Paris. Ça peut aider, j’imagine. Je suis tombé amoureux du vin grâce à ça, et vers 14-15 ans, j’ai commencé à travailler dans des restaurants. Et j’ai kiffé, donc j’ai continué. Mes parents ramenaient les produits de petits producteurs du Piémont, de Toscane, à Paris. J’ai été élevé dans ce besoin d’aller contre les gros industriels, par exemple. J’ai grandi là-dedans, et ça m’a donné cette sensibilité.

Quel a été le déclic qui t’a donné envie de te lancer dans l’aventure entrepreneuriale ?

J’avais managé des endroits par le passé et, à Noma, tu recommences en bas de l’échelle. J’avais l’ambition de faire quelque chose à moi. Je ressentais un peu de frustration, dans certains endroits où je suis passé. De la façon dont ça marche, surtout. Je pensais qu’il y avait quelque chose à développer pour les jeunes aussi. La restauration, c’est quelque chose de passionnel. Les jeunes avaient besoin de s’exprimer, et le restaurant tel qu’il existait jusque là était, pour moi, assez serré. Je suis à Paris, et en matière de restauration c’est super, mais j’avais besoin de voir autre chose, aussi. J’ai toujours eu envie de rentrer dans le sujet, d’aller apprendre à faire du vin pour être un bon sommelier, d’apprendre le service ailleurs qu’à Paris… C’est compliqué, car on opère dans beaucoup de pays différents donc en matière de comptabilité et d’administratif, c’est pas le plus simple, mais c’est une expérience incroyable.

Comment arrives-tu à organiser tes journées, puisque tu voyages énormément ?

En ce moment, c’est assez difficile, car je suis un peu entre deux. Mais dès qu’il y a un pop-up en place, il faut savoir s’accorder des petits moments. Il faut une chambre, ses produits… À Lisbonne, j’ai ma moto, mon studio de yoga, des habitudes. J’adore être là-bas, la lumière est incroyable, il y a une énergie, les meilleurs produits. C’est difficile, car je prends 5 avions par semaine, mais il faut créer des petites habitudes. Je vais souvent manger chez des potes chefs, ce sont des têtes connues. C’est important. Je n’ai aucune journée type, je suis avec mon équipe à distance toute la journée, j’ai beaucoup de rendez-vous, une vingtaine par jour, surtout au téléphone.

Tu arrives à déconnecter du travail ?

C’est dur. Le téléphone sonne tout le temps. Je prends plus le temps, lorsque je vais dîner avec des potes, ou au restaurant. Il faut que je me mette en indisponible sur WhatsApp pendant 1 heure, mais j’y arrive. Après, quand je vais dans les vignobles voir des vignerons, j’oublie aussi le téléphone.

Tu fais souvent du yoga ?

Au final, assez peu. J’en faisais beaucoup à Lisbonne, car les cours étaient faciles d’accès, sur la plage, c’était incroyable. Beaucoup moins depuis que le pop-up est fermé, mais il faut que je m’y remette. Mon sport principal, c’est le service : c’est super intense. Moins, en ce moment, mais avant, je faisais des 17 heures par jour. Je perdais 12 kilos par nouveau job - le changement d’alimentation, l’enchaînement de services physiques… Tu fonds.

Quand tu voyages, tu emmènes certaines choses avec toi partout ?

J’ai mon sac, Arket, avec une tenue noire : je suis toujours en noir, 5 t-shirts pareil, des pantalons noirs, des Birkenstock l’été et des boots l’hiver. C’est facile à enfiler, je ne prends pas de décision, j’adore. J’emmène aussi le déodorant Horace, je l’aime beaucoup. L’exfoliant, aussi, je l’emmène souvent avec moi. Le dentifrice, c’est très important aussi - dans notre métier, c’est essentiel, car on mange beaucoup.

Comment te coiffes-tu ?

J’ai beaucoup utilisé de cire, surtout dans le service car il faut être coiffé lorsqu’on sert. Je le fais beaucoup moins aujourd’hui, mais j’aime bien les produits, de temps en temps. La plupart du temps, je laisse ça naturel, et je vais chez le coiffeur tous les 2 mois. Là, ça va, ça fait 1 mois et demi ! En revanche, je vais chez le barbier toutes les 2 semaines, quelque chose de très naturel. J’ai mes habitudes dans toutes les villes où je passe. C’est mon petit moment, pas d’écouteurs, pas de téléphone, je suis tranquille.

Votre dernier pop-up, à Paris, c’était autour du petit déjeuner. À titre personnel, tu manges quoi pour ce repas ?

Oui, c’était un menu en 11 services, très créatif, pour le petit-déjeuner et le goûter, dans un appartement. Le petit-déjeuner, c’est mon repas préféré de la journée. Personnellement, j’aime beaucoup le café, j’en bois beaucoup, surtout infusé, en V60. Quand j’ai le temps, je vais voir les cafés de mes amis, et je mange ce qu’ils m’offrent, tout simplement. Ce sont eux qui décident pour moi !

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