Dans la routine de Dany Dembélé
Photos Louis Muller
Texte Matthieu Morge-Zucconi
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L'agent commercial nous parle café, longs courriers et rareté japonaise Baxter of California.
“Je reviens de vacances et traverse une grosse phase de remise en question sur mon hygiène de vie” : c’est avec cette phrase que Dany Dembélé nous accueille chez lui, à deux pas des puces de Saint-Ouen. Nous nous asseyons pour lui poser quelques questions et en savoir plus sur ce que cette remise en question change en terme de routine pour lui.
Bonjour Dany, peux-tu te présenter en quelques mots ?
Très simplement, je m’appelle Dany Dembélé et j’ai 29 ans.
Que fais-tu dans la vie ?
Je suis une sorte d’entremetteur entre le Japon et le reste du monde dans la mode. Je trouve des marques, souvent françaises, qui peuvent s’exporter au Japon, et des marques japonaises qui peuvent s’exporter dans le reste du monde. C’est une sorte de travail d’agent commercial : j’aide des petites structures à développer leur marketing et leur vision commerciale.
Comment as-tu commencé à exercer dans ce domaine ?
C’est arrivé un peu par hasard, à vrai dire. J’ai fait une partie de mes études à Tokyo. Il faut savoir qu’au Japon, à partir du moment où tu es étranger, un peu grand et un peu mince, tu peux devenir mannequin. En faisant du mannequinat, j’ai rencontré quelqu’un qui s’occupait de Wings + Horns, une marque canadienne, au Japon. Je suis rentré en France pour finir mes études à Paris VII, en langues et civilisation spécialité Asie, et il m’a appelé pour que je rejoigne Paddle, son agence, qui importait des marques au Japon. Nous distribuions alors des marques comme Homecore et Thom Browne au Japon. C’était une petite structure, donc j’ai très vite pris des responsabilités et on m’a demandé de trouver de nouvelles marques : j’ai par exemple travaillé pour Beton Ciré, une marque de chapeaux et de bonnets aujourd’hui en vente chez Colette et au Bon Marché.
Tes études au Japon t’ont-elles aidé pour y travailler ?
Bien entendu. Déjà, je parlais japonais, ce qui est toujours un point positif pour travailler dans ce pays. Durant mes études, j’y ai fait beaucoup de choses : j’ai été serveur, j’ai étudié, j’ai travaillé en entreprise… J’ai donc beaucoup appris sur leur mentalité. C’est un pays où il y a beaucoup de codes : les japonais ne peuvent pas, par exemple, porter certaines choses.
Récemment, tu es rentré à Paris. Dans quelles conditions ce retour s'est-il fait ?
1 an et demi après avoir rejoint Paddle, je suis rentré à Paris en emmenant dans mes bagages une marque japonaise nommée Mikia, qui fait de l’accessoire, comme des bracelets. C’était aux débuts de l’avènement de ce genre d’accessoires pour les hommes. Lorsque je suis revenu du Japon, j’avais des propositions de marques très bien installées, mais aussi de maisons de luxe, pour travailler dans les bureaux qui gèrent le commercial au Japon. J’ai voulu tenter l’aventure en solitaire, et ai eu la chance de trouver la bonne marque au bon moment, je dirais. C’était le bon choix. Dans une grande maison, je n'aurais été qu'une partie d’un bureau. Là, j’aide vraiment des marques à trouver leur public et à se développer. C’est très stimulant.
Tu travailles donc toujours en étroite collaboration avec le Japon.
J’ai fait au cours de ma première année à Paris, environ 7 voyages au Japon, tous ayant duré entre 2 semaines et 1 mois. J’ai toujours besoin d’y retourner régulièrement. Le Japon, c’est une sorte de laboratoire de tendances : ce qui y est mainstream aujourd’hui le deviendra dans 2 ans en France. Paraboot, par exemple, connaît un retour en grâce aujourd’hui mais il est parti du Japon. Il y a quelques années, c’était une marque de professeur d’histoire. Aujourd’hui, on en voit beaucoup plus.
Où se trouve ton bureau parisien ?
J’ai un bureau dans le 17ème, rue des Dames. Je le partage avec un concept store pour lequel je fais du consulting, Noyoco. Je ne suis pas obligé d’aller au bureau, j’y vais un peu quand j’ai besoin. Je suis un peu casanier, donc je préfère faire certaines tâches seul ici, chez moi. Je travaille souvent les pieds sur la table basse et l’ordinateur sur mes genoux !
Comment s’organise ta journée de travail ?
Tout dépend des périodes. Les périodes des fashion week sont évidemment plus difficiles, car je dois voir beaucoup de clients. En temps normal, je déjeune beaucoup avec des personnes du milieu. Je parle beaucoup de travail, en fait, mais c’est nécessaire : on évolue dans un domaine où il est indispensable de savoir ce qu’il se passe, donc en discuter est bénéfique. Ensuite, donc, je vais au bureau, puis je finis vers 20h. Parfois, je peux pousser jusqu’à 22h.
Parviens-tu à déconnecter du travail ?
Pas vraiment. Comme je te disais, je reçois énormément de mails, à n’importe quelle heure. Lorsqu’une partie du globe se couche, une autre se réveille, et ainsi de suite. Je prends peu de vacances et même lorsque j’en prends, je reste disponible par mail, car c’est une vraie nécessité.
J’imagine que tes horaires sont assez souples, si tu n’es pas tenu d’être à un bureau à heures fixes.
Oui. Je ne suis naturellement pas très matinal. Je me réveille vers 8h30, 9h, selon ma journée et ce que j’ai fait la veille. Je travaille d’abord depuis ici, surtout sur mes mails - j’en ai tout le temps, comme je travaille à la fois avec le Japon et les États-Unis, donc sur plusieurs fuseaux horaires. Je ne me rends au bureau que vers 13h, lorsque j’y vais. J’y vais en scooter.
Quelle est la première chose que tu fais en te levant ?
Je bois un grand verre d’eau. Un ami me l’avait conseillé - je pensais que c’était un effet placebo mais ça marche vraiment pour se sentir mieux lorsque l’on se réveille, alors qu’on est souvent déshydraté. Je saute ensuite directement dans la douche.
Quels sont les produits de ta routine ?
Adolescent, j’ai pris l’habitude de prendre soin de ma peau pour éviter les boutons. J’ai longtemps utilisé Aésop mais je suis passé aux produits Baxter of California. Je trouvais le packaging beau et avais envie d’essayer, et finalement le produit est excellent, donc je n’ai plus changé. J’utilise le Facial Scrub une fois par semaine, et une crème hydratante que j’achète au Japon. J'ai beaucoup de produits Baxter, jusqu'aux bougies !
Tu utilises la Supershape SPF15. C’est le premier produit créé par Baxter. Tu sais qu'ils ne le font plus ?
Oui malheureusement, mais j’ai quelques réserves. C’est une crème très hydratante, ce qui m’est indispensable puisqu’étant métisse, j’ai la peau assez sèche. Lorsque je n'en aurai plus, je passerai sans doute au Oil Free Moisturizer. À part ça, j’utilise un contour des yeux d’une marque bretonne, Ho Karan, et je porte toujours le même parfum, depuis deux ans.
Je n’ai jamais vu cette marque auparavant, peux-tu m’en dire plus ?
C’est une marque qui s’appelle Oriza L. Legrand. Je suis un jour passé devant la boutique, située rue Saint Augustin, et j’y suis rentrée. C’était l’un des parfumeurs des rois de France et, d’après la petite histoire, ils ne font que des senteurs d’époque, avec des recettes remises au goût du jour. La marque est tombée dans l’oubli dans les années 1930 mais elle a été reprise et aujourd’hui, c‘est fabriqué en France. Le mien s’appelle “Déjà le printemps”.
Que prends-tu au petit déjeuner ?
Un café, que je fais à la mode japonaise, avec un filtre directement posé sur la tasse, et un fruit. Là-bas, ils font tous leur café comme ça, même au bureau !
Tu voyages beaucoup, n’est-ce pas ?
Oui, pour le travail. Je vais principalement au Japon, logiquement, mais aussi à Londres et aux États-Unis. Le fait d’être à Paris est d’ailleurs très pratique pour cela.
Qu'est-ce qui rend Paris si pratique ?
Quand tu as passé 4 ans sur une île, avec des voyages très longs, des vols de 14h quasiment tout le temps, avoir une position aussi centrale en Europe est une bénédiction.
Comment t’organises-tu pour ces longs courriers ?
J’ai la fâcheuse habitude de tout faire au dernier moment. En 4 ans, j’ai dû faire le trajet Paris-Tokyo trente fois au moins. Pourtant, je continue à prendre mes billets quatre jours avant le départ, à préparer ma valise au tout dernier moment. La seule chose que je maîtrise, c’est mon look d’avion.
Quels sont tes secrets pour bien voyager ?
J’arrive toujours bien habillé dans l’espoir un peu vain d’être surclassé, puis je me change dans l’avion. Je porte un jogging Homecore car, quand on fait 1m90 et qu’on est pas en business, pour un long courrier, il faut être à l’aise.
Comment fais-tu pour éviter le jetlag ?
Je n'ai pas vraiment de secret. J'en souffre pas mal car lorsque je suis au Japon, les journées sont intenses et qu'il est souvent difficile de se reposer. J'essaye de dormir au maximum dans l'avion, comme tout le monde. Le matin où nous croisons sa route, Dany Dembélé n'a pas de long courrier à prendre. Le voilà qui enfourche son scooter, direction un déjeuner avec un collègue du milieu, puis le bureau. Aujourd'hui, ce sera Paris. Demain, qui sait ? Photos : Louis Muller