Comment détecter et gérer son anxiété ?
Photos D.R. / Freepik
Texte Anthony Vincent
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Au même titre que la dépression, l’anxiété affecte la santé mentale de beaucoup d’hommes. En particulier depuis l'isolement provoqué par les confinements dus à la crise sanitaire, favorisant solitude et angoisses.
Stress, solitude, insomnie : la pandémie a aussi des effets néfastes sur notre santé mentale. Au 12 novembre 2020, le taux des états dépressifs était de 21 % et celui d’anxiété de 20,8 %, en population générale, selon CoviPrev, une enquête nationale de Santé publique France. Avant le Covid, environ 10% de la population était habituellement concernée. De fortes hausses qui alarment jusqu’au ministère de la Santé, comme le relevait récemment Le Monde.
Quand l’anxiété devient pathologique
Moins connue que la dépression, l’anxiété concerne pourtant beaucoup d’hommes, selon le psychopraticien Morgan Lucas qui la définit ainsi : “C’est une réponse naturelle de l’esprit et du corps face à des situations stressantes. Un sentiment de peur, d’appréhension, face à l’idée de ce qu’il va arriver ou pourrait arriver, comme avant une rentrée des classes, la veille d’un grand discours ou d’un entretien d’embauche, par exemple. C’est un sentiment normal et utile. Mais l’anxiété devient pathologique à partir du moment où elle est répétée et dure sur une période de six mois ou plus. On parle alors de Trouble Anxieux Généralisé (TAG).”
Comment reconnaître qu’on souffre d’anxiété ?
“Au quotidien, cela se manifeste par du mal à respirer à cause d’un sentiment de boule au ventre, de peur latente, des palpitations, sueurs froides, difficultés à vous endormir ou obtenir un sommeil réparateur”, liste l’expert en santé mentale. “Cela peut aussi passer par des TOC (troubles obsessionnels compulsifs) et/ou des crises d’angoisse récurrentes : une perte de contrôle, souvent accompagnée d’hyperventilation et de tremblements, l’impression de devenir fou ou de mourir, et ce sans raison apparente, sans cause identifiée.”
Briser le cercle vicieux de l’anxiété
Ruben, chef de projet dans l'ingénierie nucléaire de 32 ans, a justement commencé à consulter une psychologue pour apprendre à gérer son anxiété devenue handicapante suite au premier confinement : “Ça faisait un moment que je trouvais que je stressais de manière disproportionnée, surtout à cause du travail, mais ça contaminait tout le reste de ma vie. Du coup c’était un cercle vicieux car je prenais de moins en moins soin de moi, de mes proches. Je n’avais plus de libido, ce qui aggravait mon anxiété.”
Des ami.e.s lui ont pourtant recommandé une psychologue : “Longtemps j’ai refusé d’en parler aux autres et d’admettre à moi-même que c’était un problème car j’ai été élevé en tant qu’homme, qui ne doit pas pleurer, pas avoir peur, sinon c’est la honte. Je me mettais encore plus la pression pour toujours surperformer sans rien laisser transparaître. Le premier confinement m’a tant éprouvé qu’il m’a servi de déclic pour me décider à consulter.”
Les TCC et l’EMDR, des approches efficaces face à l’anxiété
“Ma psychologue m’a diagnostiqué de l’anxiété de performance : peur démesurée d’être jugé, évalué, d’échouer, de ne pas être à la hauteur, de décevoir”, raconte l’ingénieur. “Alors on travaille à ce que j’apprenne à mieux gérer mes émotions, dont la peur et la colère. Et à ce que je puisse désamorcer par moi-même mes escalades de stress et scénarios catastrophe. En plus de son approche TCC, on a aussi fait des séances d’EMDR.”
Comprendre : Thérapie Comportementale et Cognitive (qui se veut brève : de 1 à 6 mois, généralement) qui part de situations concrètes pour améliorer nos réactions face à celles-ci. L’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing) consiste à “reprogrammer” le cerveau par des mouvements d’yeux pendant qu’on évoque des situations ou émotions précises.
“Les TCC s’avèrent très efficaces pour traiter toutes les formes d’anxiété, l’EMDR plutôt en cas de traumatisme ou syndrome de stress post-traumatique”, nous confirme le psychopraticien Morgan Lucas
Faute de consulter, peut-on gérer seul son anxiété ?
“Si vous pensez être concernés, je vous recommande d’en parler à votre médecin traitant ou d’aller voir un psychiatre, psychologue ou psychopraticien (ce qu’on appelait avant psychothérapeute)”, poursuit Morgan Lucas. “En attendant, vous pouvez tenter la méditation, les exercices de respiration, et le yoga. Les autres sports contribuent aussi à réguler les hormones de stress et favoriser le bien-être. Vous pouvez également répertorier dans un carnet vos montées d’anxiété : la date, l’heure, le contexte, vos réactions, et ainsi identifier vos éventuels déclencheurs (triggers) afin de mieux les appréhender.”
Il continue : “Vous pouvez aussi extérioriser par la musique, le chant, le dessin : ce qui marche pour vous afin de vous exprimer, sans prendre pour autant votre moitié ou meilleur ami pour un psy. Plus vous adressez le problème de l’anxiété tôt, moins il aura le temps de prendre de la place dans votre vie, voire votre personnalité même. Il n’y a aucune honte à demander de l’aide et consulter.”